Refuge à la campagne
Champêtre pour la décoration chinée, brut pour les matériaux, romantique pour l’histoire derrière chaque objet, bohème pour la délicatesse des détails, campagnard pour le style architectural de la bâtisse et son aménagement... Fanny et Pierre ont mis une grande part de leur âme dans cette maison de vacances, située dans le Namurois, qu’ils ont rénovée et décorée avec un goût très sûr.
C’est du toit de sa grange où il posait les dernières ardoises que Pierre a vu les habitants de la maison voisine quitter résidence. Datant de 1920, la bâtisse - l’une des constructions d’origine du village – avait tapé dans l’œil du Bruxellois depuis belle lurette. L’acquérir sommeillait probablement en lui diront même certains. En briques du pays, l’habitation est juxtaposée à deux bâtisses construites par Pierre lui-même ; une maisonnette écologique et une grange en « poteaux-poutres » de chêne. Toutes les trois ont vue sur les hectares de terrains privés de la famille classés Natura 2000, terrain de jeu du trentenaire qui y a découvert sa passion pour la construction. C’est avec sa compagne, Fanny, que la visite a été réalisée en 2018. Tout comme devenir un jour propriétaire de la maison relevait probablement du destin, sa rencontre avec la Bruxelloise devait l’être tout autant. « Cette boutique, on dirait toi. Tu dois y aller et rencontrer ces gens », s’entend dire un jour Fanny, conservatrice et restauratrice de peinture spécialisée en art moderne et contemporain, par une amie proche. La boutique dont il est question est celle des parents de Pierre, propriétaires de « A la Page » à Bruxelles.
Passion chantier
Mauvais état ou pas, ce fut une évidence. Dès la porte passée, nous avons vu le potentiel de cette habitation et su nous projeter », déclare Fanny qui explique que cette rénovation était aussi une façon pour Pierre de l’inclure dans sa vie à Buissonville. Restait à trouver une finalité à cette nouvelle propriété. N’ayant jamais été question d’y emménager, le couple a décidé d’en faire sa maison de campagne mais aussi de la proposer à la location en lui donnant un joli nom : l’École Buissonnière. Mettant sa vie professionnelle entre parenthèses durant deux ans et rejoint les week-ends et vacances par Fanny, Pierre a entrepris, dans un premier temps, l’assainissement de la structure architecturale. Chapeau de protection de la maison, la toiture a été l’étape numéro une. Au programme : isolation par insufflation de cellulose produite à Achène, ardoises naturelles espagnole Samaca, tuiles faîtières d’un artisan de Mettet, gouttières ardennaises en cuivre… Dans un second temps, le mur séparant l’ancien atelier de la cuisine a été abattu, ce qui a permis d’ouvrir les lieux et de créer une mezzanine à l’étage. Fanny et Pierre rêvaient d’un espace de vie polyvalent, aéré et lumineux où l’on cuisine, mange, papote ou boit un verre. Terminée par une verrière - anciennement celle du restaurant Le Mess à Bruxelles -, la pièce offre un accès direct au jardin. A l’autre extrémité, un deuxième point de lumière a été créé. Il s’agit d’une ancienne porte transformée en fenêtre par la Menuiserie Riche à Mariembourg. Au plafond, les poutres apparentes d’origine ont été conservées, tout comme les carreaux de ciment au sol, également présents dans le salon et la buanderie. Les carrelages datant des années 70 ont été, quant à eux, remplacés par du béton lissé. « Dans un souci de gestion patrimoniale, nous avons préservé les éléments d’origine de la maison construite dans les années 20, enlevés ceux sans intérêt et ajoutés des touches contemporaines », explique Pierre. L’extraction du carrelage a, par ailleurs, permis d’isoler le sol et d’installer le chauffage. Toujours dans un esprit de préservation et de récupération, le couple a été amené à acquérir les carreaux de ciment de la véranda chez une habitante de La Louvière, à acheter des radiateurs en fonte restaurés à Arras, à dénicher un escalier en bois à Charleroi ou encore à se procurer des tuiles d’un château de la région.
Une quête sans limites
Uni par la passion des brocantes, le couple ne s’est pas contenté de chiner quelques éléments. C’est l’ensemble de ceux qui composent la bâtisse qui l’a été. Du frigo Smeg à l’établi en bois et métal en passant par la machine à café Nespresso, tout ou presque a été chiné. Durant deux ans, Fanny et Pierre ont fouillé les sites et boutiques de seconde main, se sont rendus à des vide-greniers et arpenté de multiples brocantes. Une quête qui les a emmenés aux quatre coins de la Belgique et procuré un sentiment de voyage. « Avec Fanny, il n’y a pas de limite. Parfois, on roule et tout d’un coup, elle voit un panneau vide grenier. Si je conduis, je sais que je dois m’arrêter. Si c’est Fanny, elle va tellement ralentir que je vais lui proposer de s’arrêter », explique Pierre, sourire aux lèvres. Même le papier peint de l’une des chambres date de 1910 et a été acheté sur Vintage Wallpapers. Une antiquité qui, vu son grand âge, a causé au moment de la pose, quelques sueurs froides à la propriétaire qui traite la bâtisse comme une véritable œuvre d’art. Chiner, autant pour Fanny que pour Pierre, est plus qu’une passion. C’est un style de vie en cohérence avec leurs valeurs écologiques et celles invitant à la slow life. « Chiner, ça implique d’être patient, de prendre le temps, d’attendre pour assouvir une envie, d’accepter de ne pas avoir tout, tout de suite ». Tous les objets, meubles et pièces dénichés petit à petit et stockés dans un garage durant deux ans à Bruxelles créent aujourd’hui une véritable harmonie dans cette bâtisse. Décrire le style décoratif qu’ils ont créé s’avère délicat. « Romantique, bohème et sensible », pour Pierre. « Champêtre, intimiste et brut », pour Fanny.
Art et artisanat
L’aboutissement esthétique ne pourrait être ce qu’il est sans les œuvres d’art et les pièces d’artisans qui subliment la décoration. Dans les chambres, on retrouve les luminaires en biscuit de porcelaine de Sixtine Jacquart, sur le lit un coussin du Le Petit Coin conçus à base de vieux tapis, dans la salle de bains des pétales décoratifs de Glas et Glas. Au mur, disséminées au sein de l’habitation, des œuvres contemporaines de Miguel Oliver, Manon Bara et Margueritte Vermandere viennent parfaire le tout. Des petits trésors par dizaines qui se révèleront à celles et ceux qui découvriront l’École Buissonnière.